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J’accuse, la société, moi en premier, d’être un producteur de violence physique et symbolique sur les couches les plus vulnérables de notre communauté: femmes et enfants.

Par Aguibou DIALLO

Pierre Bourdieu nous enseigne que la violence symbolique est une méthode originale de domination. Si la violence physique est un moyen incontournable d’obtenir l’obéissance nécessaire à l’ordre social, la violence symbolique est plus efficace dans la mesure où elle est subtile et invisible. En effet, elle appartient à la famille des phénomènes symboliques.

Bien que le geste de ce marabout est condamnable et répréhensible, il est pour autant le produit d’une chaîne de violences dont nos usages et moeurs sont la fabrique.
Les sévices sont une donnée transactionnelle du mode de transmission des « valeurs » éducatives.

Mieux, cette affaire met au goût du jour le schisme politique et social qui fracture notre société, mais qui tient par l’entremise du syncrétisme dont le Sénégal est le seul pays en avoir le secret.

Les laïcs, c’est à dire, nous autres aliénés de l’école de la république, musulmans s’il en est, confinons nos concitoyens des daaras au statut de réguliers. Apprendre le coran, receuillir les offrandes, que les charlatans nous prescrivent, en contre partie de leurs voeux.

Ceux là n’ont pas de droits, ou s’il en existe, c’est le devoir de souffrir en silence. D’être la lisière qui établit la frontière entre deux types de citoyens, deux catégories de groupes sociaux différemment appréhendés par la société, qui se prolonge au sein de l’appareil d’État.

On reconnaît à nos saints toute la plénitude de leur sainteté, abstraction faite qu’ils sont les produits des daaras. A l’inverse, nous nous égosions à longueur de notre séjour terreste de nos gouvernants, pour leur incurie et pour l’impéritie que traduit leur mode de gouvernance, mais jamais il ne nous vient à l’esprit de réinvestir l’appréhension globale de tout ce corpus éducatif (daaras et école laïque faisant un) comme fabrique de citoyens égaux en droits et en dignité.

Hélas, quand la vision de l’élite intellectuelle, politique et, il faut oser le dire, maraboutique, se limite à la fixité, à entretenir un rapport de domination qui étouffe les surclassements de l’infiniment possible chez les autres, il ne peut y avoir de remèdes pour la névrose collective.

Nous sommes tous coupables, ce marabout tortionnaire n’est que le reflet de la névrose produite de la chaînes de violences que nos usages et moeurs produisent.

Enfin, si la faute politique est imputable à l’élite dirigeante, la faillite morale en incombe aux guides religieux.

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